"PEEP-HOLE-ISATION" ET INTERNET - 1ère PARTIE
Je reviens à présent sur la troisième assertion du phénomène de « peep-hole-isation ». Cette assertion est la suivante : « Le citoyen investit le débat politique en s’appropriant les outils de communication – et ainsi délaisse les vecteurs traditionnels – substituant son intérêt particulier aux intérêts de la nation ».
Il est évident aujourd’hui que le vecteur par lequel le citoyen spectateur/électeur s’approprie les outils de communication au regard des présidentielles est principalement le blog. Les blogs politiques sont nombreux sur
Ainsi, cette catégorie n’est pas homogène. En effet, alors que le blog du spectateur/électeur contribue à véhiculer les opinions de ce dernier vers les politiques en évitant qu’elles ne soient formatées par les médias traditionnels, le blog des politiques permet de communiquer, a priori dénué de tout artifice nécessaire pour capter l’attention des médias traditionnels, individuellement avec son auditoire. C’est bien ici que réside la différence entre la communication par les médias traditionnels et celle par voie de blog. Les médias traditionnels sont des moyens de communication de masse à sens unique. Le politique (l’émetteur) avec une bonne dose de séduction martèle un discours pour lequel il n’espère pas de réponse immédiate. Les nouveaux vecteurs de communications tel que le blog, rendent possible, au contraire, une véritable discussion. Alors le politique devient tantôt émetteur, tantôt récepteur, ce qui contribue (enfin oserai-je dire ?) à un rapprochement entre sa vision politique et ses effets sur la société, et donc sur chaque individu.
Mais l’on comprend bien, également, qu’en raison de cette relation directe avec chaque citoyen participant à ce débat, se profile à l’horizon un débat modifié par les aspirations de chaque citoyen. La raison est simple : quand bien même un candidat obtiendrait la majorité des suffrages, les motivations ayant conduit à une telle majorité diffèrent d’un électeur à un autre. Ce qui signifie, en d’autres termes, que de la diversité des motivations de chaque électeur peuvent naître une multitude de candidatures. Certes ces candidatures prises individuellement n’exprimeront pas la majorité des suffrages, toutefois, prises dans leur ensemble elles représenteront certainement la majorité de ces suffrages. Je m’explique.
Je lisais cet été un ouvrage de Chris Anderson ayant pour titre « The Long Tail ». Dans cette ouvrage, l’auteur analyse les bouleversements dans l’industrie des divertissements qui résultent de la démocratisation des procédés de production (ordinateurs, imprimantes) et de distribution (internet, numérisation …). Le postulat énoncé par l’auteur est simple : plus l’offre de biens de consommation relatifs à l’industrie des divertissements est développée, plus elle rencontre un public et ce en raison de la démocratisation des moyens de distribution de ces biens et de la variété des besoins des consommateurs.
L’exemple le plus classique de cette théorie est celui des fournisseurs de musiques en ligne. Tout d’abord, il faut noter qu’en raison du processus de numérisation de la musique, les capacités de stockage de ces musiques sont illimitées lorsqu’on les compare à celles des magasins géographiquement localisés (« brick and mortar stores »). Dès lors, l’offre de biens par un fournisseur en ligne est supérieure à celle d’une enseigne ayant un local physique. Ensuite, puisque l’offre est supérieure, elle est de fait plus diversifiée. C’est ici d’ailleurs que repose la clé de voûte de cette théorie. Prenons Virgin ou la Fnac par exemple. Leurs magasins géographiquement localisés proposerons toujours en grande quantité les hits du moments. La raison est simple, les titres qui sont diffusés en boucle sur les ondes sont ceux vers lesquels une grande majorité du public se tourne naturellement. De fait, ces hits et particulièrement les artistes auteurs et/ou compositeurs et/ou interprètes de ces hits contribuent en grande partie au chiffre d’affaires des majors. Cependant, à côté de ces hits demeurent des milliers d’œuvres musicales variées qui ne sont certes pas référencées dans les magasins des enseignes visées plus haut mais qui pourtant ont un public. La théorie du « Long Tail » énonce que ces œuvres musicales non référencées en magasins mais sur Internet génèrent une demande substantielle. La demande pour l’ensemble de ces œuvres est supérieure à celle pour les hits. D’où la conclusion selon laquelle l’offre diversifiée d’un produit crée sa propre demande. C’est l’économie de l’abondance.
Ceci étant dit, quel est le rapport avec les présidentielles de 2007 ?